
L’Amérique du pire et du meilleur. D’un côté, Top Gun Maverick, de Joseph Kosinski, avec Tom Cruise. J’avais assez aimé le Top Gun de Tony Scott, déjà avec Tom Cruise, quand il est sorti, en 1986. A cette époque, je me grillais encore une Marlboro après avoir bouffé un McDo en cachette de moi-même. Dans la connerie militariste, les acrobates du ciel avaient des petites gueules de cancres chahuteurs bien sympathiques. La scientologie est passée par là. Et il vaut mieux ne pas parler de la guerre en Irak.
Je n’aurais jamais dû me laisser tenter par ce revival, cette panouille à 152 millions de dollars. C’est un concours de loopings et de hugs entre vieux copains de chambrée. Jusqu’à la scène où le bien conservé Tom Cruise retrouve le rongé par le cancer Val Kilmer dans un moment de cinéma-vérité, plutôt gênant. Je suis sorti de la salle au début de la scène suivante, quand j’ai compris que ce Joseph Kosinski, spécialisé dans les remakes impossibles, comptait m’imposer les retrouvailles du petit Tom encore utile avec une ex de 50 balais (Jennifer Connelly), genre « T’as d’beaux restes, tu sais ». Avaler ça au nom de leur répugnante religion de la LOVE, c’était trop me demander.
En rentrant à la maison à pied, profitant des dernières saisons où cela sera encore possible, je veux dire avant que les terrasses des bistrots et des restos aient définitivement colonisé les trottoirs de Paris pour ne plus laisser qu’un petit couloir dédié à la circulation des trottinettes, je me suis demandé si cette tendance actuelle au revenez-y, ce mème de la nostalgie militaro-hollywoodienne n’était pas l’expression symbolique de la couardise yankee initiée par Obama en Syrie avec sa « ligne rouge anti-armes chimiques », poursuivie par Trump en Crimée avec son « même pas peur, j’en ai une plus grosse que la sienne », achevée par Biden dans le Donbass avec ses armes à l’Ukraine pour qu’elle ne fasse pas la guerre à la Russie, et il vaut mieux que je ne parle pas de Macron qui gagne les guerres que le Covidland et l’Islamie ne nous ont pas déclarées, et perd celle que la Russie a faite à la France au Mali, une phrase n’est jamais trop longue quand elle passe par l’Afrique et qu’elle en aboutit au fait que seule la Russie a le droit de faire la guerre là où bon lui semble.
La BD géniale de Peter Bagge
Arrivé à la maison, un truc m’a tué, mais de bonheur, d’admiration, de reconnaissance, la BD de Peter Bagge. Vraiment, là, à chaque page je me suis dit la vie est belle en compagnie de génies pareils. Vous ne connaissez pas Peter Bagge ? Les connaisseurs le connaissent, ce vieux Peter, puisque c’est lui qui a pris la succession de Robert Crumb et de son épouse Aline Kominsky à la tête de Weirdo, la revue phare de la BD underground américaine dans les années 1980-1990. Si vous voulez en savoir plus sur la question et ne pas mourir inculte, vous lirez avec un grand intérêt l’exposé de Vincent Bernière en introduction de l’album que je vous ordonne d’acheter, parce qu’il est beau, émouvant, d’une intelligence et donc d’une drôlerie, la vraie, celle qui recèle ce petit miel de tendresse indispensable à la vacherie. D’ailleurs le titre dit tout : HATE.
Oui, haine en français qui s’écrit HATE en américain, comme avoir hâte, car tout est désir dans l’art, tout est urgence. L’urgence de raconter par des dessins et des dialogues de malade les aventures minuscules et épiques de Buddy Bradley, glando de première, intermittent agent d’un groupe de punk-rock de Seattle. Une ville où il vient d’emménager avec deux autres colocs, Leonard, dit Stinky (le Puant), et George, un névropathe addict aux shows TV les plus avilissants de la trash culture. Le problème de Buddy étant de ramener une gonzesse, et d’abord d’en trouver une pas trop bégueule.
La bonne nouvelle, c’est que cet album de 327 pages n’est que le premier d’une série, il y en a deux autres à paraître. C’est publié par Revival. Vive l’Amérique, dans ces conditions.