
Xavier Dolan, le surdoué
La perle : Laurence Anyways (2012)
Sélectionné au Festival de Cannes dès son premier long-métrage, J’ai tué ma mère (2009), à tout juste 20 ans, le Montréalais s’est imposé en huit films comme un auteur total au style unique, entre intimité à fleur de peau et flamboyance pop. Traité en frère par la critique et le public français (trois César dont celui du meilleur réalisateur pour Juste la fin du monde en 2016), l’acteur-scénariste-réalisateur est un ardent défenseur de la Belle Province. Régulièrement sous-titrés, ses dialogues puisent dans les argots locaux les plus sibyllins, si bien que les Québécois eux-mêmes se plaignent de ne pas tout comprendre… Un geste esthétique et politique pour celui qui dit se battre contre »l’extinction linguistique ».
Denys Arcand, le patron

Le cinéaste québécois Denys Arcand
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La perle : Jésus de Montréal (1989)
Denys Arcand est le seul Canadien à avoir obtenu l’Oscar du meilleur film étranger avec Les Invasions barbares, en 2004. Travaillé par la réalité sociale et politique de son pays, il construit depuis les années 1960 une oeuvre prolifique, passant du documentaire, comme Champlain, consacré au fondateur du Québec, ou On est au coton, sur l’industrie textile, à la fiction, dont sa fameuse « trilogie de la décadence occidentale » avec Le Déclin de l’empire américain, Les Invasions barbares et La Chute de l’empire américain, sans jamais perdre de son mordant ni son goût de la polémique. A 81 ans, celui qui brocarde volontiers le « politiquement correct canadien » prépare une satire intitulée Testament. Irréductible…
Denis Villeneuve, l’exilé

Le cinéaste québécois Denis Villeneuve
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La perle : Sicario (2015)
Dune, Premier contact, Blade Runner 2049… Ses films l’ont imposé comme grand architecte de la science-fiction hollywoodienne, spécialiste des défis technologiques et des budgets pharaoniques. A tel point qu’on a presque fini par oublier que Denis Villeneuve est né à Bécancour et parle avec l’accent québécois. Le concurrent direct de Christopher Nolan (qui l’admire) a débuté en 1991 grâce au prix de courts-métrages organisé par Radio Canada, puis a tourné ses quatre premiers longs au Québec (dont Polytechnique, qui revient sur la tuerie de 1989), avant de répondre à l’appel de l’usine à rêves et devenir un maître du blockbuster haut de gamme. Il se décrit lui-même comme « le contraire de Xavier Dolan ».
Jean-Marc Vallée, le disparu

Le cinéaste québécois Jean-Marc Vallée
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La perle : Wild (2014)
Le 25 décembre 2021, à 58 ans, Jean-Marc Vallée succombait à un arrêt cardiaque. Révélé à l’international en 2005 avec le succès de C.R.A.Z.Y., pur concentré de nostalgie seventies, il est repéré par Martin Scorsese qui lui confie la réalisation de Victoria : les jeunes années d’une reine (2009). Sa mise en scène musicale et son écriture romantique font bel effet à Hollywood, où il collectionne les nominations aux Oscars (dont six pour Dallas Buyers Club) avant d’opérer une transition vers la série (Big Little Lies et Sharp Objects, saluées par la critique). A sa mort, Denis Villeneuve a rendu hommage à ce « grand frère » dont le flair a ouvert tant de portes aux cinéastes québécois. On ne verra jamais sa romance inspirée de l’histoire de John Lennon et Yoko Ono.
Monia Chokri, la relève

La cinéaste québécoise Monia Chokri
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La perle : Babysitter (2022)
Étiquetée « muse de Xavier Dolan » dès ses premiers grands rôles dans Les Amours imaginaires (2010) et Laurence Anyways (2012), après une apparition dans L’Âge des ténèbres de Denys Arcand en 2007, Monia Chokri aurait pu se contenter de briller chez ses concitoyens. C’était méconnaître cette actrice cinéphile, biberonnée aux séries B et au cinéma direct (un mouvement proche de la Nouvelle Vague, apparu au Québec dans les années 1960), qui considère le cinéma comme « un art de l’exploration ». Passée à la réalisation avec son court-métrage Quelqu’un d’extraordinaire (2013), elle révèle son sens de la comédie dans La Femme de mon frère (2019) puis Babysitter (2022), un conte post-MeToo bourré d’humour noir et d’audaces visuelles.